biochimiste taphophile
La mort est un sujet tabou qui concerne pourtant tous les humains, sans exception. Tellement tabou qu’aux endroits où on devrait le voir le plus souvent, c’est-à-dire dans les cimetières, il est invisible. Et il est tout aussi tabou dans le langage. Plutôt que de le nommer on dira:
Décéder, être emporté, claquer, périr, rendre l’âme, y passer, crever, partir, succomber, s’éteindre, passer l’arme à gauche, manger les pissenlits par la racine, trépasser, casser sa pipe, paraître devant Dieu, partir les pieds devant, perdre la vie, la liste n’est sûrement pas complète.
Pourtant environ 100 milliards d’Homo Sapiens sont déjà morts et il en meure encore environ 150 000 par jour. Et pourtant nous croyons tous, contre toute logique, que la mort, c’est pour les autres. Je dirais même que quelque part dans notre for intérieur, dans cette partie du cerveau qui n’obéit pas aux règles de la logique, nous nous sentons immortels. Sinon, pourquoi vivre? D’ailleurs les humains depuis toujours, dans tous les pays et toutes les cultures, ont cherché un sens à la mort et ont refusé d’admettre que la mort soit la fin de l’être humain. Les religions, sans exception, prônent toutes une forme d’existence dans l’au-delà. On pourrait même affirmer que les religions existent d’abord et surtout pour donner un sens à la mort et aussi libérer les humains de l’angoisse fondamentale face à cette mort inévitable. Elles visent aussi à apporter un certain réconfort aux mourants et à leurs survivants. Je vais pourtant m’éloigner pour cet article des aspects culturels, philosophiques et religieux de la mort, et je ne vais pas non plus parler des rites entourant la mort. Non pas parce que ces sujets manquent d’intérêt, loin de là, mais parce que je me suis donné comme objectif cette fois-ci d’essayer de faire comprendre la mort en tant que phénomène biologique. Pour une très bonne introduction du sujet, il faut d’abord lire « La mort » de Richard Béliveau et Denis Gingras1, une indispensable source d’information.
Quelques notions fondamentales
Avant d’aller plus loin, notons que le mot « mort » recouvre plusieurs réalités. Il peut signifier l’état d’être inanimé (être mort), mais aussi le passage de la fin à trépas (mourir). D’ailleurs c’est « mourir » qui nous effraie tant, car nous en serons conscients, et nous ignorons si ce sera pénible ou pas, alors qu’être mort équivaut à ne plus exister en tant que personne, ce qui ne peut pas être douloureux, même si la partie émotive de notre cerveau se rebelle à cette idée. Il faut aussi reconnaître que la mort est une nécessité pour l’espèce humaine dans son ensemble. Et pour toutes les espèces biologiques tout aussi bien. Les générations doivent se succéder pour que l’évolution de l’espèce se poursuivre et s’exprime. Il faut aussi accepter le fait qu’elle est inévitable selon les lois fondamentales de la physique, qui dicte que tout l’univers et ses éléments, dont nous sommes, se dirige naturellement vers le désordre. Le maintien de la vie est donc une lutte incessante contre la détérioration, mais c’est au prix d’une consommation d’énergie extérieure considérable. La réparation des dégâts que nos corps subissent est très efficace, mais tout de même imparfaite, de sorte que l’usure progressive finit par avoir raison de nous, tôt ou tard. C’est pourquoi, parmi les 150 000 décès quotidiens des humains, au moins les 2/3 sont causés par l’âge, par le passage du temps, autrement dit. Et cette proportion frise même 90% dans les pays riches. L’expression « mourir de vieillesse », qu’on dénigre souvent, correspond pourtant à la réalité, très souvent, même si un événement spécifique précipite la fin dans chaque cas.
Une définition qui a évolué
Les définitions classiques de la mort, par exemple celle apparaissant sur Wikipédia, se lisent à peu après ainsi :
« Cessation inévitable, permanente, irréversible de toutes les fonctions biologiques ».
Ça semble clair, mais du point de vue médical le mot « irréversible » peut présenter un problème, selon les critères utilisés pour attester la mort. Ces critères ont évolué au cours des siècles, parallèlement à l’avancement de la médecine et de la technologie. Et même encore aujourd’hui, on se pose encore cette grande question : à quel moment précis devenons-nous morts. La définition précise de la mort varie même subtilement d’un pays à l’autre, au niveau médical comme au niveau légal. Bien sûr, il est toujours important de s’assurer qu’un patient et bel et bien mort avant de le déclarer comme tel, mais c’est encore plus crucial si on envisage de prélever certains organes pour une transplantation. On a longtemps cru que la vie s’arrêtait quand le cœur s’arrêtait. Puis on a reconnu que la mort résultait plutôt de l’arrêt de la respiration ET des activités cardiaques. Mais avec les nouvelles technologies, en particulier les techniques de réanimation, certaines personnes pouvaient « renaître » d’un arrêt respiratoire et cardiaque. Jusqu’à quel moment cette réanimation est possible?
On se le demande de plus en plus. Le cas le plus extrême bien documenté2 est celui d’un alpiniste qui à 2000 mètres d’altitude dans les Dolomites est entré quasi instantanément en hypothermie profonde, arrêt cardiaque, arrêt respiratoire, encéphalogramme probablement plat. Mort? Oui et non, pas tout à fait. On a réussi à l’héliporter dans un hôpital, puis à le soumettre à une circulation extracorporelle pour réchauffer son sang et l’oxygéner, puis soumis à une défibrillation. Après 8 heures d’arrêt cardiaque, la circulation sanguine spontanée est rétablie, le patient reprend connaissance. Il s’en sortira indemne.
On s’entend maintenant pour dire que la mort est plutôt l’arrêt total de l’activité électrique du cerveau, telle que détectée par électroencéphalographie. Si le prélèvement d’organes pour transplantation est envisagé, on ajoute obligatoirement plusieurs autres critères. On s’assure que le tronc cérébral n’est plus fonctionnel, donc apnée totale, absence de réflexes au niveau de la tête et du coup, aucun réflexe cornéen, disparition de la réactivité de la pupille à la lumière, et de quelques autres réflexes. Et on revérifie le tout à plusieurs reprises, espacées de 6 heures, avec le concours de deux médecins différents. Cette définition, qui a cours légal en Amérique du Nord, est valable à condition que certaines situations ne viennent pas compliquer les observations, par exemple une forte dose de certaines drogues, une hypoglycémie profonde, une hypoxie, et quelques autres situations exceptionnelles, telles qu’après une décharge électrique violente ou chez une personne retrouvée inconsciente sous la glace (comme l’exemple ci-haut). Alors si on voulait continuer de définir la mort par l’arrêt cardio-vasculaire, on ne pourrait plus dire que la mort est irréversible. Quand une personne décède (arrêt total du cerveau) on peut par ventilation mécanique et stimulation électrique conserver de nombreuses fonctions organiques. C’est ce qu’on fait, notamment pour garder en bon état les organes d’un donneur d’organes, en attendant la transplantation. C’est d’ailleurs assez déroutant pour les proches qui voient le défunt qui respire, dont l’électrocardiogramme est à peu près normal et qui conserve un teint « santé », mais qui est pourtant décédé, comme en témoigne son encéphalogramme plat. Ce qui est tout aussi étonnant, c’est que le corps, même sans activité cérébrale peut continuer d’exercer certaines fonctions, telles que : régulation de la température corporelle, excrétion des déchets, guérison des plaies, combat contre l’infection et même, croyez-le ou non, donner naissance à un fœtus. Certains réflexes peuvent encore se produire, si la moelle épinière est active. Le plus spectaculaire est le « signe de Lazare » : la personne fléchit les avant-bras jusqu’à ce que ses mains atteignent le cou ou la poitrine. Difficile à bien réaliser que cette personne est pourtant morte. On se souvient d’une cause très célèbre, le cas Terri Schavio, qui était dans un état post-coma irréversible, mais qu’on nourrissait artificiellement. L’époux de la dame voulait qu’on la « débranche » pour utiliser le terme brutal, mais populaire, mais les parents de madame s’y sont opposés, alléguant qu’elle n’était pas, selon eux, morte. S’en suivit un défilé de poursuites et de contre-poursuites qui a duré de nombreuses années, pour aboutir jusqu’à la Cour suprême et même à une intervention du président Bush. Le volet religieux était très présent, tout au long, ce qui brouillait les cartes énormément. Le cas « Vincent Lambert », en France a été encore plus problématique, car par suite d’un accident de la route il est resté dans un état végétatif pendant plus de 10 ans. C’était vraiment un cas limite, car il semblait initialement un peu conscient, quoique de moins en moins, il réagissait à certaines stimulations et respirait par lui-même, mais ne pouvait pas se nourrir. Il était donc peut-être dans un état à mi-chemin entre la vie et la mort. Était-il conscient? La bataille autour de ce cas a mobilisé le système juridique français et enflammé l’opinion publique. Tout ça pour dire que « mort » n’a pas la même signification pour tous. Les frontières entre vie, état végétatif irréversible, coma prolongé et mort sont plus floues qu’on aimerait le croire.
La cause ultime de la mort
Bien sûr, la mort peut avoir diverses causes initiales : usure générale du corps, maladies en tout genre : cancer, trouble cardio-vasculaire, diabète, maladie génétique, ou une autre des 13 600 maladies connues, infections, traumas, poisons. Mais ultimement, le résultat de ces troubles est un arrêt des fonctions vitales par blocage de l’apport d’oxygène aux divers organes. Nous avons vu précédemment que le corps ne peut survivre sans un apport extérieur constant d’énergie. Dans ce cas, c’est une molécule appelée ATP qui fournit l’énergie chimique dans chaque cellule, plus précisément dans les mitochondries cellulaires, véritables petites génératrices, et cette ATP ne peut être y être généré que par un apport important d’oxygène. L’organe le plus énergivore est le cerveau, qui consume 20% de l’énergie apportée, bien qu’il ne représente que 2% de du poids corporel. Cette énergie est requise pour la transmission des influx nerveux dans tout le corps. Lorsque la circulation s’arrête, pour quelque raison que ce soit, l’oxygène ne peut plus être transporté dans les organes, c’est la panne d’énergie et tout s’effondre. Inversement, si le cerveau s’arrête, c’est également la fin. Il serait donc plus exact de définir la mort ainsi :
« Perte irréversible des fonctions cérébrales qui définissent note unicité, que celle-ci soit la cause de l’arrêt cardiaque ou qu’elle en soit la conséquence ».
La mort cellulaire
La nécessité biologique de la mort s’impose non seulement au corps humain entier et ses organes, mais aussi à chacune des cellules qui le composent. Et ce de deux façons. D’abord par ce qu’on appelle l’apoptose. C’est ni plus ni moins la mort programmée de la cellule. Elle s’accomplit par le travail d’une « enzyme de la mort », la captase. Son activité est déclenchée lorsque certaines molécules s’échappent des mitochondries vers le cytoplasme, signal de mauvais fonctionnement. Un très complexe processus s’enclenche alors et la cellule est finalement détruite, comme si la cellule se « rendait compte » qu’elle n’est plus fonctionnelle, se suicide et laisse sa place à une cellule jeune. C’est le sort de 10 milliards de nos cellules, à chaque jour.
Un autre processus important est le raccourcissement des télomères de l’ADN. À la fin de la très longue séquence de nucléotides, donc au bout de chaque chromosome, on trouve une courte séquence très répétitive. À chaque division cellulaire, le nombre de répétitions diminue, donc les télomères sont en quelque sorte des compteurs du nombre de divisions. En dessous d’un certain nombre de répétitions la cellule ne peut plus se diviser et meure. Il existe pourtant une enzyme qui peut réparer la réduction des télomères, c’est la télomérase, mais elle est désactivée. Elle est réactivée, cependant, dans les cellules cancéreuses, qui deviennent en quelque sorte immortelles. Voici donc un champ de recherche promoteur en cancérologie, du moins en principe : trouver un inhibiteur de la télomérase.
Mourir et en revenir
Pour être mort, il faut d’abord mourir. Vérité de La Palice. C’est le moment que nous craignons tous et c’est le moment où la déchéance du corps devient irréversible. On peut appréhender, comme « spectateur » que la fin est toute proche, voire imminente, par une série de signes variables : somnolence, confusion quant au lieu et au temps, désocialisation, besoins de nourriture et de fluides diminués, perte de contrôle de la vessie et des intestins, peau froide, râles, respiration irrégulière, douleurs, mouvements involontaires. Mais au moment précis où tout bascule, un mystérieux phénomène peut se produire : l’expérience de la mort imminente2. On ne peut plus considérer que c’est un mythe, car il a été rapporté à maintes reprises par des personnes qui étaient convaincues qu’ils étaient sur le point de mourir, mais qui en sont revenues. Après avoir été longtemps considéré avec un certain mépris par les scientifiques, il est admis maintenant que le phénomène est bien réel et certains laboratoires de neurologie et de thanatologie réputés l’étudient activement.
Ce qui a compliqué l’acceptation de la réalité du phénomène, et probablement aussi la collaboration des scientifiques, c’est qu’un certain mouvement religieux y a vu la preuve de l’existence de l’âme et d’un au-delà, croyance fondamentale de plusieurs religions. Les manifestations varient, mais ceux qui sont revenus à la vie, pour qui le processus a fait marche arrière, signalent plus souvent les manifestations suivantes : sentiment intense de bien-être, sensation de flotter hors du corps, c’est-à-dire se voir selon une perspective aérienne, entrée dans un tunnel lumineux au bout duquel brille une zone de lumière plus intense. Impression que la vie se défile sous ses yeux. Et souvent, une rencontre, soit avec un proche décédé qui nous est cher, soit avec un personnage bienveillant. Et dans bien de cas l’agonisant voit se défiler « le film de sa vie » un résumé des événements de sa vie. L’interprétation que le « revenant » fait de ces images est influencée par ses convictions personnelles. Il faut garder à l’esprit aussi que les témoignages sur le phénomène proviennent de personnes qui ne sont pas vraiment mortes, puisqu’elles ont pu en parler. Qu’est-ce qui se passe ensuite, quand le moment ultime de non-retour survient, nul ne le sait et personne ne le saura jamais non plus, probablement. Si on veut rester dans le domaine de la science, ces phénomènes sont en bonne partie des illusions générées par le cerveau, comme d’autres hallucinations déjà bien connues (exemple : drogues hallucinogènes). Cependant, comme le signale le réputé expert Stéphane Charpier2 certaines manifestations bien documentées et crédibles semblent défier la logique et même les lois de la physique et ne trouvent pas d’explications scientifiques pour le moment. Ce qui est tout de même assez troublant. À ce sujet, une très importante découverte3 a été faite tout dernièrement, début 2022. Par un concours de circonstances particulier, des chercheurs ont pu enregistrer les ondes cérébrales d’un mourant peu avant et peu après son arrêt cardiaque. Or il appert que le schéma d’ondes enregistré était typique des oscillations cérébrales impliquées dans la récupération de la mémoire, alors que le cerveau réalise peut-être un dernier rappel des événements importants de la vie d’une personne avant de mourir, similaires à ceux rapportés dans les expériences de mort imminente. La bonne nouvelle, c’est que ces ondes sont également typiques d’un état cervical très serein. Se pourrait-il que le dernier moment de notre vie soit aussi le plus agréable? On peut tout de même l’espérer et ainsi calmer un tant soit peu notre hantise de la mort (du mourir, pour être précis).
La vie après la mort
Oui, il y a de la vie après la mort, mais pas celle de notre corps. Même si certaines personnes ont prétendu, au cours de l’histoire, avoir réussi le tour de force de ramener un défunt à la vie. Par exemple, cette histoire plutôt cocasse du Dr Robert Cornish, qui en 1934 prétendait avoir réussi à « ressusciter » 5 chiens, et qui a demandé qu’on mette à sa disposition des corps de condamnés, pour les ramener à la vie après leur exécution. Les autorités ont refusé, car on craignait que ça réussisse! Ils anticipaient de devoir exécuter ces criminels une deuxième fois ou même de devoir les laisser en liberté. Dépourvu de cadavres, le savant fou met fin à ces expériences. Un peu plus sérieux, mais à peine, la cryogénie à la Walt Disney, où le cadavre est rapidement congelé dans l’air liquide et conservé jusqu’au jour où l’avancement de la science pourra le faire revivre en décongelant sans endommager et en inversant la maladie qui a emporté le défunt. Une technique qui n’a pas du tout fait ses preuves.
Mais non, c’est de la vie des organismes vivants qui assaillent les cadavres qu’il sera question ici.
Si vous avez le cœur sensible, vous préférerez peut-être éviter ce qui va suivre, mais la biologie de la mort s’intéresse aussi à ce qui se passe après le décès. Si le cadavre est incinéré ou détruit par action chimique (aquamation, par exemple), l’enchaînement des événements que nous décrirons un peu plus loin ne s’applique pas, bien entendu. Mais elle s’applique aussi si le cadavre a été embaumé, même si dans ce cas le processus est plus lent, et même si le défunt est enterré dans des tombes prétendument à l’épreuve du temps. Les étapes de la décomposition des cadavres sont très sérieusement étudiées par certaines équipes de scientifiques. Il existe un centre aux États-Unis, à Knoxville au Tennessee, où on laisse des cadavres à l’air libre dans un parc (clôturé !!) pour mieux étudier le phénomène. Une bonne description (humoristique par surcroît) des activités de ce centre est faite par Mary Roach, autrice du livre4 « Macchabées, La vie mystérieuse des cadavres », qui a visité l’endroit. J’ai aussi appris que l’Université de Québec à Trois-Rivières a mis sur pied un centre de même genre tout près de chez nous, à Bécancour, pour étudier le processus en milieu nordique. C’est le centre REST(ES). Si le sujet vous intéresse, je recommande de voir le site Web de REST(ES)5. La professeure australienne Shari Forbes, est à la tête d’une nouvelle chaire de recherche à l’UQTR sur la décomposition des corps humains. Elle est une sommité mondiale en criminalistique, plus exactement en thanatologie médico-légale. Il faut comprendre que tout ce qu’on peut apprendre sur la décomposition des cadavres est très utile aux enquêteurs investiguant les cas de mort possiblement criminelle. Pour préciser le moment du meurtre, surtout, mais pour éclairer d’autres interrogations également. Les amateurs de polars connaissent tous Dr Kathy Reichs qui dans ses romans mentionne souvent des observations, telles que l’allure des larves de mouche, qui aident à préciser le moment du décès.
Parlons donc un peu de la chronologie des événements post-mortem. Les experts connaissent la durée et l’enchaînement des phases de la décomposition des cadavres, mais ils doivent aussi tenir compte des facteurs influençant le processus tels que la température, l’humidité, le type de sol, etc. C’est ainsi qu’ils peuvent préciser le moment du décès avec une marge d’erreur de plus en plus étroite. Sans trop entrer dans les détails techniques et scabreux, voici, par ordre chronologique, les étapes clés.
- Lividité ou décoloration, descente du sang vers le sol après quelques heures.
- Baisse de température corporelle. 2o C dans la première heure, environ 1 o C / h ensuite
- Rigidité cadavérique, débutant après 2-3 heures, progressant du haut vers le bas du corps, maximale 12 à 18h, en décroissance après 36h et disparue après 48h.
- Autodestruction des cellules, sortie du potassium cellulaire. Le niveau de potassium dans l’humeur vitreuse est d’ailleurs utilisé pour préciser le moment du décès.
- Putréfaction, d’abord par les bactéries internes, après environ 48h puis arrivées des bactéries extérieures. Leur action produit un ballonnement prononcé.
- Arrivées des insectes et de leurs larves, dans une séquence connue, huit « escouades » se succèdent. Entre autres des mouches (et leurs larves), coléoptères, scarabées. L’entomologie médico-légale est même une science de plus en plus raffinée.
Conclusion
La définition de la mort a continuellement évolué, au rythme des progrès de la médecine et de la technologie. Serons-nous un jour capables de ramener de personnes véritablement mortes à la vie? Qui sait? Mais est-ce vraiment une bonne idée? C’est à voir. En attendant, nous pouvons nous consoler avec la perspective que le moment de la mort imminente puisse bien être le moment le plus agréable de notre vie, selon les témoignages de quelques chanceux qui ont pu inverser le cours des événements.
Pour en apprendre plus long
1 Béliveau R., Gingras D. La mort, mieux la comprendre et mois la craindre pour mieux célébrer la vie, Trécarré, 2010, 260 pages.
C’est LE livre qu’il faut lire pour approfondir le sujet, si on n’est pas in spécialiste du domaine. Très complet, écrit dans un style abordable et fort bien illustré. Excellente vulgarisation.
2Charpier, S. La science de la résurrection. Flammarion, 2020.
L’histoire de la réanimation, et un résumé des connaissances actuelles sur le sujet sont racontés par un neurologue du centre de recherche de l’Hôpital Pitié-Salpêtrière. Fascinant. Le cas de réanimation extrême résumé plus haut y est présenté. Le chapitre sur les expériences de mort imminente est à souligner. Un texte qui fait réfléchir sur la difficulté de délimiter la frontière entre la vie et la mort.
3Article original dans la revue « Frontiers in aging neuroscience » à propos du cas de mort imminente enregistré dans une électroencéphalographie.
https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnagi.2022.813531/full
La nouvelle a été diffusée très rapidement dans toute la planète, et pour cause. Voir par exemple ici : https://dailygeekshow.com/ondes-cerveau-mort/
4 Roach M. Macchabées, La vie mystérieuse des cadavres. Calmann-Lévy, 2003, 175 pages.
Où on peut apprendre tout ce qui peut arriver à un cadavre. Très bien documenté par une enquête sur le terrain, et croyez-le ou non souvent humoristique.
5 Site Web de REST(ES), https://oraprdnt.uqtr.uquebec.ca/pls/public/gscw031?owa_no_site=816
Le site contient une vidéo très bien faite qui explique le travail effectué dans le parc où sont laissés des cadavres pour étudier la décomposition des corps.