
Artiste et Commissaire

Ces 46 cimetières présentent une histoire et des caractéristiques singulières. Ainsi, il est difficile de ne pas être frappé par l’allure des monuments funéraires et des symboles qu’ils recèlent. Ces cimetières n’ont pas seulement contribué à définir les paysages, mais ce sont aussi des lieux de fixation des influences du XXIème siècle. On peut y constater les traces des différents styles artistiques, religieux ou profanes, des communautés protestantes, anglicanes ou catholiques, et ce, dès le début de leur implantation dans les Cantons-de-l’Est.
Entre 2014 et 2021, M. Lachance a réalisé un recensement photographique de tous les cimetières fermés de l’ancien Comté de Stanstead. Avec ce matériel et s’appuyant sur la documentation historique, de même qu’à l’aide d’une série d’entrevues réalisées avec des membres de la communauté, il aborde avec un regard artistique les thèmes de l’oubli, de l’effacement, de la disparition et de l’abandon des sites funéraires.
Enfin, le projet « Les cimetières oubliés du comté de Stanstead » a été réalisé dans le plus grand respect des personnes inhumées, des membres de leurs familles et des communautés concernées. En aucun cas ce projet ne porte un jugement de valeurs sur les cimetières, les monuments et les aménagements observés.
Site internet : http://cimetieresoublies.com


* Entre 1855 et 1982, l’ancien comté de Stanstead regroupait les cantons de Magog, de Hatley, de Stanstead, de Barnston et celui de Barford.
RÉAMÉNAGEMENT DES CIMETIÈRES
Plusieurs cimetières inactifs ont été réaménagés et leurs pierres tombales ont été déplacées, effaçant les traces de l’emplacement des sépultures. Dans ces réaménagements, le rôle symbolique de la stèle s’est transformé, passant de phare qui indique l’endroit qui a été le bout du chemin d’un individu, à celui de quelques lignes qui tentent encore de renseigner les générations du futur. Un mensonge, qui veut dissimuler la vérité d’une finitude et qui porte au silence, le glas qui sonne, la disparition des personnes qui se sont tues à jamais.
Sur 10 sites réaménagés, des miroirs ronds, rappelant des sépultures égarées, ont été disposés sur le sol. Des photographies aériennes font apparaître les miroirs comme des trous s’enfonçant dans le sol tout en reflétant les cieux. Ces installations éphémères d’art contemporain veulent témoigner du respect envers toutes les personnes disparues dans les brumes de l’histoire et tenter, d’une façon poétique, de réhabiliter leur mémoire.



LES SYMBOLES, OÙ LE PROFANE REJOINT LE RELIGIEUX
Les symboles permettent de saisir ce que la raison ne peut définir. Toutes les communautés, à toutes les époques, ont en commun un système de symboles. La décision d’en inscrire un sur la pierre tombale d’un défunt n’est pas le fruit du hasard. Ce choix est souvent le reflet des tensions entre le social et l’individu. Le combat entre le conformisme à la communauté et l’affirmation de sa différence se résout souvent par le symbole.
Quant à la signification exacte des symboles que l’on retrouve sur les stèles dans le comté de Stanstead, par manque d’interlocuteur direct pour en vérifier le sens que l’on pourrait leur donner, nous devons nous en tenir à certaines interprétations découlant du contexte historique du XIXième siècle.


À la suite de notre rencontre au musée Colby-Curtis, nous nous sommes baladées avec Jean-François au cimetières Rose et Crystal Lake dans le comté de Stanstead qui nous a expliqué la signification des symboles sur plusieurs des stèles.
L’agneau
Symbole d’innocence, de pureté et de candeur. Est associé aux sépultures d’enfants.
Les mains unies
Lesmains unies expriment la concorde, la solidarité, l’entraide et la fraternité. L’espoir de rester unis au-delà de la mort.
La main avec un doigt pointé vers le ciel
Symbole de puissance, de transcendance et de sacralité. La main dont le doigt pointe vers le ciel indique le chemin vers le paradis, là où se trouvent la vérité suprême et la vie éternelle.
La main l’index pointe vers la terre.
L’incarnation de la force divine, de la manifestation de son esprit et de sa protection.
La rose
L’image de l’âme. L’amour éternel et la régénération. Le sang du Christ. La tige de la rose brisée symbolise le décès d’une jeune fille ou d’une jeune femme. Le bouton de rose symbolise une mortalité infantile.
L’angelot
Un nourrisson ou un enfant décédé en bas âge.
La couronne et la croix
Synonyme de gloire, d’élévation, de puissance et d’illumination. Incarnent la victoire sur la mort et la promesse d’une vie immortelle. Signe de l’Ordre maçonnique des chevaliers Templiers. Orné, occasionnellement à la base de la couronne, des initiales « F.d.I. », ce symbole incarne l’appartenance au Cercle des Filles d’Isabelle.
Le saule pleureur
Symbole de la vie. Le lien entre la terre et le ciel, entre Dieu et les hommes. Étêté, il représente la mort, intervenue brutalement. Il évoque, par ses branches souples et pendantes, les larmes du deuil. Il peut représenter la renaissance par la facilité avec laquelle une branche arrachée donne des racines en étant plantée dans le sol.
Le laurier
La gloire éternelle et l’immortalité.
L’ancre
L’une des trois représentations des vertus théologales : l’espérance.
La couronne
Symbole d’éternité par le cercle qu’elle épouse, une forme sans début ni fin.
La gerbe de blé
Symbole de la moisson, de l’abondance et de la prospérité. Les tiges unies en un seul élément incarnent l’assemblée des âmes au paradis. C’est la puissance de l’union induite par l’intégration des éléments en un tout.
Le gland
Suggère le printemps et la promesse d’une renaissance.
La chaîne
Représente la vie ou la mort si un maillon est cassé. Un élément important de la symbolique de la franc-maçonnerie.
L’urne
L’enveloppe corporelle comportant l’âme.
Le coeur
Le coeur représente la charité dans les valeurs théologales.
La colombe
La pureté de l’âme qui sert d’intermédiaire entre le ciel et la terre. Représentation du Saint Esprit. Elle symbolise l’envolée de l’âme vers le ciel.
La colonne
La colonne brisée évoque la fatalité, la solidité ébranlée d’un édifice et la vie fauchée avant l’heure.
L’équerre et le compas
Signe distinctif de la franc-maçonnerie. Le compas représente l’esprit tandis que l’équerre symbolise la rectitude et le droit. Peut s’accompagner occasionnellement en son centre de la lettre « G », qui réfère à la Grande Loge 24.
Les feuilles de chêne
Personnifiées par l’immortalité, la solidité, la stabilité et la longévité.
L’obélisque
Associé au souvenir. Incarne pour la franc-maçonnerie la puissance, la stabilité, la résurrection et l’immortalité.
La croix
La résurrection et la victoire de la vie sur la mort. Un lien entre la terre, le monde des humains, et l’univers céleste des dieux. Elle est constituée d’un montant et d’une traverse qui suggèrent les quatre points cardinaux ainsi que la notion d’universalité.
Le muguet
La chasteté et la pureté.
Le lierre
L’éternité, l’attachement ou l’immortalité.
Le livre
La Bible. Le livre ouvert incarne, par ses deux pages vierges, l’idée d’une fin prématurée, dont l’existence n’est pas refermée sur la page ultime. Le livre, peut suggérer l’ouvrage ou les ouvrages écrits par un défunt ; il sera accompagné d’un encrier et d’une plume. Les protestants y feront souvent figurer un passage de la Bible avec la référence.
Le lys
La pureté, l’innocence et la profondeur de l’âme. La tige cassée symbolise la mort d’un nouveau-né ou d’un enfant.